Pour Julie Hutin, la présidente et fondatrice de StemInov, c’était le "challenge majeur". Avant de songer à exploiter le potentiel thérapeutique des cellules souches issues du cordon ombilical, il fallait être en mesure de les produire en quantité suffisante. L’équipe de la start-up nancéienne StemInov, alliée au Centre hospitalier régional universitaire de Nancy pour former le consortium Sesame, est en passe de réussir ce défi. Lauréat de l’appel à projets "innovations en biothérapies et bioproduction" lancé par le Secrétariat général pour l’investissement, le consortium vient de décrocher un financement de 5,2 millions d’euros, accordé dans le cadre du plan d’investissement France 2030, pour développer la première plateforme industrielle de production de cellules souches issues du cordon ombilical.
Des cellules cultivées en trois dimensions
Fondée en 2019 sur la base des travaux menés par Danièle Bensoussan, cheffe de service de l’Unité de thérapie cellulaire et banque de tissus du CHRU de Nancy, StemInov a fait la preuve de l’efficacité des cellules souches présentes dans la gelée de Wharton, ce tissu dont le rôle est d’entourer et protéger les vaisseaux du cordon ombilical, contre le choc septique et le syndrome de détresse respiratoire aigu.
400 essais cliniques à travers le monde
Capables de moduler une inflammation, de régénérer des sites lésés et disposant de propriétés antibactériennes, ces cellules et les candidats médicaments développés grâce à elles font l’objet de "plus de 400 essais cliniques à travers le monde", assure Julie Hutin. "Aujourd’hui, StemInov a réussi à acquérir un savoir-faire et a déposé un brevet sur l’extraction des cellules du cordon. L’amplification des cellules n’est pas réalisée par couches, en deux dimensions, mais dans des bioréacteurs, en trois dimensions", ajoute-t-elle.
Avancer dans le respect des bonnes pratiques de fabrication
Concrètement, les cellules vont adhérer à des billes, pour pousser beaucoup plus vite : "Et en obtenant de meilleurs rendements, nous allons aussi réussir à diminuer le prix de ce type de thérapie", pointe la présidente de StemInov. Pour utiliser ces cellules chez des humains, la start-up va installer, dans les locaux de Ease, à Strasbourg, un isolateur permettant de respecter les GMP, les bonnes pratiques de fabrication, nécessaires pour avancer vers la production d’un médicament. "Nous avons cherché, sans succès, une salle blanche à Nancy", déplore Julie Hutin, qui a donc choisi de travailler avec la plateforme industrielle de l’Université de Strasbourg. Depuis sa création, StemInov, qui opère grâce à une équipe de trois personnes, a déjà rassemblé 2,1 millions d'euros d'argent public et 600 000 € apporté par le fonds Finovam : la jeune pousse cherche maintenant à boucler, avant la fin de l’année, un nouveau tour de financement pour un total de 4 millions d’euros.
Vers un nouvel essai clinique
"Nous sommes toujours sur un tour d’amorçage", souligne Julie Hutin. "Ce nouveau tour de financement doit aussi nous permettre de mener un essai clinique avec notre candidat médicament WhartSep chez des patients atteints de pneumonies sévères", détaille la présidente de StemInov.
À ce stade de la recherche, l’enjeu pour la start-up est de travailler sur la dose à administrer, la cohorte de patients mobilisés, tous en réanimation, ne dépassant pas une dizaine de personnes. Ces travaux devraient amener l’équipe de StemInov jusqu’à fin 2026 : "A ce moment, il faudra passer sur un essai clinique de phase II pour lequel il faudra à nouveau lever des fonds", anticipe Julie Hutin.