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Pizzorno Environnement, un groupe devenu roi des poubelles dans le Var, et au-delà
Var # Gestion des déchets

Pizzorno Environnement, un groupe devenu roi des poubelles dans le Var, et au-delà

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En un demi siècle, le groupe Pizzorno Environnement, né à Draguignan, est devenu un acteur incontournable du monde des déchets. D'abord dans le Var et même au-delà depuis le début des années 2000, appliquant avec succès la "stratégie de l'araignée". Aujourd'hui, ses 2 500 collaborateurs laissent des villes et communes plus propres de Lille à Nice, en passant par Marseille, Lyon ou Paris.

En 2022, Pizzorno remporte plus gros marché. D’un montant de 161 millions d’euros, il porte sur la collecte des déchets ménagers de 61 communes de la Métropole Européenne de Lille, qui comptent 500 000 habitants — Photo : Camille Moirenc

Pour ses 50 ans d’histoire, le groupe Pizzorno Environnement s’est offert, avec un peu d’avance, un chiffre d’affaires record. Ce chiffre a atteint 264,6 millions d’euros en 2023, alors que les 50 bougies viennent tout juste d’être soufflées en ce printemps 2024.

Un record porté par la marque de fabrique du groupe, à savoir un "excellent" taux de renouvellement des contrats (98,5 %) mais aussi par le démarrage des prestations relatives au contrat de collecte de la Métropole Européenne de Lille (161 M€), le plus gros marché de l’histoire du groupe, fondé à Draguignan par Francis Pizzorno. Un record battu il y a quelques semaines, avec le renouvellement d'une collaboration de 30 ans avec les communes de Fréjus, Saint- Raphaël et Roquebrune-sur-Argens. Esterel Côte d'Azur Agglomération a en effet choisi de de lui attribuer le contrat de collecte des déchets et de propreté urbaine de son territoire pour une durée de 7 ans, représentant un montant total de 186,1 millions d'euros.

"Né de parents italiens arrivés en France en 1930, autodidacte, il commence sa carrière dans le transport de denrées alimentaires et créé, en 1974, Dragui-Transports, la société originelle du groupe. Sensible à son environnement, il se lance dans la collecte des déchets qui jusque-là s’entassaient sur des terrains vagues dans chaque commune", raconte Frédéric Devalle, son gendre, arrivé dans l’entreprise familiale en 1994 et qui confie, avec ironie "qu’il a fallu qu’il travaille un peu plus que les autres pour faire ses preuves."

De la collecte à la valorisation

Francis Pizzorno, fondateur du groupe Pizzorno Environnement — Photo : Pizzorno Environnement

C’est pour centraliser tous ces déchets que Francis Pizzorno ouvre en 1976 le premier centre d’enfouissement technique du Var, au Cannet-des-Maures, "contribuant à la disparition des décharges communales jusqu’en 2018", année de sa fermeture. Le groupe collecte, stocke puis valorise aussi, à partir de 1997 avec l’ouverture du centre de tri du Muy. Devenu un outil ultra-moderne, il a plusieurs fois été retenu comme site expérimental pour tester l’extension des consignes de tri, le recyclage des petits emballages légers métalliques ou encore la valorisation du tout plastique. Aujourd’hui, ce centre traite les emballages de plus de 500 000 Varois et de près du double en été… Car c’est là une des valeurs ajoutées du groupe Pizzorno. Né dans le Var, premier département touristique de France, il a fait de sa capacité à s’adapter à la forte fréquentation estivale un atout majeur.

De Draguignan à Lille en passant par les Champs-Élysées

Son premier marché de collecte, Francis Pizzorno le décroche au début des années quatre-vingt, auprès de la commune de Flayosc, "et nous l’avons toujours", souligne Jean-Charles Devalle, petit-fils du fondateur, entré dans l’entreprise familiale en 2019 en stage, puis en CDD. Depuis il ne l’a pas quittée et est aujourd’hui directeur du pôle dédié aux affaires générales. Considérant qu’il n’y a pas de petit client, le groupe répond à toutes les opportunités de marché dans le Var, "qu’il s’agisse de collecter les déchets de 300 ou de 3 000 habitants, puis davantage avec la création des communautés de communes à partir de 1992."

À Draguignan, Fréjus/Saint-Raphaël, à Sainte-Maxime puis dans le Golfe de Saint-Tropez, à Toulon, il collecte les déchets, assure la propreté des rues ou nettoie les plages… Jusqu’à nos jours, le groupe de Draguignan se fait un nom à l’échelle du Var. "À mon arrivée en 1994, l’entreprise réalise 200 millions de francs de chiffre d’affaires (48,4M€, NDLR)", se souvient Frédéric Devalle.

Le groupe Pizzorno a renoué en 2021 avec son "plus beau contrat, celui de la propreté de l’avenue des Champs-Élysées." — Photo : Camille Moirenc

Dès 1997, Pizzorno va voir ce qu’il se passe de l’autre côté de la frontière est du département, à Saint-Jean-Cap-Ferrat, dans les Alpes-Maritimes. Puis, ce sera la Roya, la Vésubie et en 2001, "nous avons pris un tiers du territoire de Nice. Un lot que nous avons renouvelé l’année dernière pour 7 ans", se félicite Frédéric Devalle. L’année précédente, Pizzorno faisait un premier pas à Paris pour assurer la collecte du verre dans 10 arrondissements avant de remporter quelques années plus tard, "son plus beau contrat d’image", celui de la propreté de l’avenue des Champs-Élysées. Les années 2000 seront celles de la conquête, remportant des marchés à Lyon, Valence ou Grenoble, avec un crochet par Marseille. Le groupe, qui réalise alors 80 millions d’euros de chiffre d’affaires, entre en Bourse en 2005 pour "financer le contrat global de propreté de collecte de la ville de Toulon et son développement." Un développement qui passe un temps par le Maroc et la Mauritanie, mais un temps seulement, le groupe préférant concentrer ses efforts sur le seul marché français.

En 2022, il fait une belle percée dans les Bouches-du-Rhône, intervenant dans 10 communes du Pays d’Aix et trois communes du Territoire Istres Ouest Provence. Puis, en 2023, ce contrat historique avec la Métropole lilloise, "un marché détenu depuis 116 ans par Veolia." La stratégie de "l’araignée", qui consiste à gagner de grandes villes pour grandir ensuite sur un territoire, fonctionne à plein régime.

2 500 ambassadeurs

Mais si le groupe est devenu un acteur qui compte dans le monde du déchet, "c’est grâce à nos 2 500 collaborateurs, nos premiers ambassadeurs", confie Frédéric Devalle. Ces salariés sont en première ligne, et leurs gestes peuvent faire la différence. "Interrompre sa tournée pour ramasser un déchet, faire le geste que les autres ne feront pas, ces actions contribuent à laisser une planète plus propre et renforcent aussi la satisfaction de nos clients, une satisfaction que Francis Pizzorno avait érigé en principe pour rester dans une ville", raconte Frédéric Devalle.

Les deuxièmes et troisièmes générations à la direction du groupe Pizzorno : François, Frédéric, Magali et Jean-Charles Devalle — Photo : Pizzorno Environnement

Cette force vive, Magali Devalle, la fille du fondateur, devenue présidente le 28 mars 2017, lui dédie un livre qui retrace en photos 50 années d’histoire. En préface de ce même livre, Frédéric Devalle écrit que ce demi-siècle "n’aurait pu s’écrire sans celles et ceux qui s’engagent au quotidien, qu’ils soient ripeurs, ingénieurs ou agents de tri."

Des déchets devenus ressources

Pour développer l’appartenance à l’entreprise, le budget de formation est conséquent et chaque salarié peut évoluer en interne. Une formation d’autant plus indispensable dans un secteur où les pratiques n’ont plus grand-chose à voir avec celles des années soixante-dix. Parce que les déchets sont devenus des ressources, le tonnage d’ordures réceptionnées sur le site d’enfouissement de Pierrefeu ne fait que décroître. Le groupe collecte et composte les biodéchets, il trie et transforme les mâchefers en grave, un matériau utilisable dans les travaux publics. Il valorise les déchets en chaleur et électricité au sein de l’unité de valorisation énergétique toulonnaise, dont il a la délégation depuis 2013. Le centre de tri du Muy valorise 98 % des matières réceptionnées. Enfin, depuis deux ans, le groupe exécute, à Valence, un marché, pour lequel il sera rémunéré sur la baisse du tonnage. D’ici 2028, il livrera le Pôle de transition environnemental de la Dracénie, une chaufferie alimentée par un combustible issu des déchets et connectée à un réseau de chaleur pour chauffer les établissements du territoire. Ce marché, le groupe Pizzorno ne l’a pas décroché tout seul, mais avec Paprec, entré au capital du groupe à hauteur de 20 % en 2021.

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