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Pierre Fraquet entame la mue d’IES
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Pierre Fraquet entame la mue d’IES

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À 35 ans, Pierre Fraquet vient de reprendre IES, une entreprise d’ingénierie nomande cofondée par son père. Un défi pour ce jeune homme qui, tout en préservant l’identité de l’entreprise, souhaite lui insuffler un vent de renouveau autour du développement de nouveaux secteurs d’activité et de l’accélération du déploiement de la RSE.

Pierre Fraquet, directeur général d’IES, a pour priorité la diversification de l’activité de son entreprise, notamment vers les secteurs du nucléaire et de l’énergie, et l’accélération sur les secteurs de la pharmacie et de l’aéronautique — Photo : Sébastien Colle

C’est une petite révolution au sein de la gouvernance d’IES, un bureau d’études et d’ingénierie dans le secteur de l’industrie, basé à Port-Jérôme-sur-Seine. Pierre Betremieux, l’un des deux fondateurs historiques de l’entreprise normande avec Olivier Fraquet, en 1999, a décidé de céder ses parts et d’entamer une nouvelle activité dans le tourisme. Et c’est Pierre Fraquet, le fils de son associé, qui vient de reprendre le flambeau de cette PME de 140 salariés au chiffre d’affaires de 12 millions d’euros.

"Jusqu’à ma reprise, les deux associés détenaient 50 % chacun de l’entreprise. À présent, je suis majoritaire à 51 %, ce qui me donne une légitimité pour asseoir mon arrivée à la tête de l’entreprise", précise le directeur général d’IES qui a donc aussi racheté 1 % des parts de son père. "C’est une manière de déjà penser à la suite, même si mon père va m’accompagner pendant au moins cinq ans".

"Une démarche de reprise audacieuse"

Un véritable challenge à relever pour ce jeune homme de 35 ans, ingénieur diplômé de l’Institut supérieur d’études logistiques au Havre (2012) et de l’Institut européen d’administration des affaires de Fontainebleau (MBA en management en 2016).

Pierre Fraquet a fait l’essentiel de sa carrière chez Schneider Electric. Depuis 2012, il a occupé divers postes de manager, en France et en Asie, au sein du groupe industriel français. Même Guillaume Pepy, président du réseau Initiative France, venu au Havre en juin dernier soutenir les nouveaux lauréats du réseau Initiative Le Havre Estuaire dont fait partie Pierre Fraquet, a salué "la démarche de reprise audacieuse" du jeune dirigeant.

Passation en douceur

"Ma réflexion autour du projet de reprise / transmission d’IES a débuté il y a deux ans par une discussion avec Pierre sur son avenir et celui de l’entreprise. J’avais déjà un fort attachement pour cette entreprise avec laquelle j’ai grandi et ou j’ai fait mes armes dans le monde du travail avec des boulots d’été", explique le nouveau directeur général. En 2023, les discussions s’accélèrent et une estimation du montant des titres de Pierre Betremieux est réalisée par un cabinet spécialisé.

En mai dernier, Pierre Fraquet devient actionnaire majoritaire. Il prend en charge de la gestion des opérations et du développement de l’entreprise. Son père conserve une fonction de direction administrative et financière. "Cette répartition me permettre de me concentrer sur le développement de l’entreprise et la diversification de nos activités que je veux déployer", explique le nouveau dirigeant de l’entreprise.

Une activité aujourd’hui tournée vers la pétrochimie

Priorité de Pierre Fraquet : la diversification de l’activité. IES réalise des études destinées à créer ou transformer des lignes de maintenance, de production, ou encore d’emballage, ainsi que des unités de transformation de matières, principalement pour des industriels de la pétrochimique. Ce secteur pèse aujourd’hui pour 80 % du chiffre d’affaires, avec des clients comme ExxonMobil, Chevron ou encore Lubrizol. L’objectif de Pierre Fraquet est de descendre la part de la pétrochimie à 60 % du chiffre d’affaires, en réduisant notamment "l’ExxonMobil dépendance". Un travail déjà engagé puisque IES à vu la part de chiffre d’affaires d’Exxon passer de 51 % en 2019 à 34 % en 2023.

30 %

Le secteur de la pétrochimie permet aujourd’hui à IES d’afficher une forte croissance, tout en étant rentable (avec un résultat net de 350 000 euros en 2023). Le chiffre d’affaires a progressé de 30 % depuis 2019 passant de 9 à 12 millions d’euros. Cette progression s’est réalisée "essentiellement par croissance organique avec des clients comme Chevron, Lubrizol et Total, sur lesquels nous avons réussi à positionner plus d’assistance technique", explique le directeur général d’IES.

Le jeune dirigeant ne compte pas s’arrêter en si bon chemin avec l’ambition de dépasser les 14 millions d’euros de chiffre d’affaires d’ici trois ans. Mais pour assurer son développement, Pierre Fraquet veut d’abord élargir son territoire : "IES est surtout implantée sur l’Estuaire et il y a de moins en moins de possibilités de croissance sur nos clients historiques avec lesquels nous avons déjà des contrats-cadres. Et Exxon a récemment annoncé de mauvaises nouvelles à Port-Jérôme (avec l’annonce de la suppression de 700 emplois, NDLR). Et puis, continuer à faire uniquement la même chose n’est pas ambitieux. Notre activité a atteint un plafond de verre sur l’Estuaire, il faut donc sortir de nos frontières".

Priorité à la diversification

Pierre Fraquet fait ainsi le constat d’un secteur de la pétrochimie qui s’essouffle sur son territoire et veut trouver de nouveaux relais de croissance pour assurer son développement. "Il faut trouver d’autres activités plus porteuses en termes de croissance que la pétrochimie, tout en restant attaché à notre territoire qui porte de nouveaux projets en matière de décarbonation. Mais ce ne sont pas des projets de croissance, ils nous permettront juste de compenser les pertes d’activités liées à Exxon".

L’enjeu est donc de diversifier la clientèle de la PME. "Je vise notamment le marché du nucléaire et des futurs EPR normands, mais aussi le secteur de l’énergie en général, de la pharmacie, de l’agroalimentaire et du luxe, sur la partie étude packaging, ou encore lignes e remplissage de bouteilles de parfum. Car le luxe est une industrie proche de la pharmacie pour ce qui est des parfums", indique Pierre Fraquet. Il compte aussi gagner accélérer sur des secteurs où IES est déjà présent comme la pharmacie et l’aéronautique.

Pour gagner de nouveaux marchés, Pierre Fraquet compte mettre en place des partenariats : "Nous avons besoin de partenaires premium pour pouvoir répondre aux demandes des grands donneurs d’ordres. Je veux développer le travail en partenariat avec d’autres entreprises, sur la partie exécution, afin d’être capable d’aller chercher les gros business." De quoi proposer une offre plus complète aux donneurs d’ordres, avec IES en étude de projet et à la supervision, et des partenaires choisis pour la réalisation des projets. "Nous pourrions ainsi être plus efficaces dès la réponse à un projet en proposant aussi des exécutants au client".

Expansion géographique

Parmi les chantiers ouverts par le nouveau directeur général, celui de l’expansion géographique et de l’ouverture d’agences de proximité est dans les cartons. Avec pour modèle opérationnel l’ouverture en 2023 d’une agence aux Essarts, près de Rouen, avec 6 salariés dont l’activité couvre un large spectre de compétences, de l’instrumentation aux automatismes, en passant par l’électricité, la détection incendie ou encore les risques spéciaux. "Pour pouvoir se développer sur une zone il faut s’y installer, être présent et recruter en local. Sur cette nouvelle agence mon ambition est de doubler l’effectif d’ici 2025 et de consolider nos positions rouennaises". Avec dans les projets à venir, l’ouverture d’une troisième agence dédiée au secteur du nucléaire sur le territoire de Caux littoral ou à Dieppe.

Réduire l‘empreinte carbone

L’arrivée de Pierre Fraquet à la barre d’IES est aussi l’occasion pour l’entrepreneur d’amener de nouvelles ambitions en matière de RSE. "Mon objectif est de repartir de zéro dans ce domaine pour faire un vrai bilan carbone, sur les mesures déjà mises en place dans l’entreprise et celles à prendre pour nous améliorer". Au programme RSE, la poursuite du remplacement du parc de véhicules par des voitures électriques et l’installation de bornes de recharge, ou encore un travail à mener sur la partie chauffage et climatisation des locaux. "De nombreuses initiatives ont déjà été mises en place comme l’Imprim Vert, le début du remplacement du parc automobile par des véhicules vertueux, mais aussi l’instauration de règles de vie comme éteindre les lumières et mettre les appareils sur off. Mais, il faut aller plus loin avec la mise en place d’une vraie démarche de certification avec un processus environnemental et une stratégie claire sur deux à trois ans." Après avoir obtenu le label "Happy at work" en 2019, Pierre Fraquet veut poursuivre sur la voie de la labellisation et vise le label PME + qui valorise les entreprises responsables engagées dans une démarche durable.

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