Le premier voyage au Québec date de décembre 2022. Un peu plus de 18 mois plus tard, le spécialiste messin de l’ergonomie logicielle, UX-Key, a ouvert une filiale à Sherbrooke, dans la province du Québec, prenant ainsi pied sur le marché canadien et nord-américain. En forte croissance, la start-up va boucler l’exercice 2024 sur un chiffre d’affaires de 4,5 millions d’euros, contre 2,5 millions d’euros sur l’exercice précédent. Et dans ce total, les ventes réalisées au Canada pèsent déjà pour 500 000 $.
Un pays de langue française pour démarrer à l’export
"Pendant un an, nous avons exploré le marché canadien", retrace Loïc Cueroni, le dirigeant d’UX-Key. Profitant de trois voyages et de multiples visioconférences, Loïc Cueroni a cherché à convaincre ses prospects des possibilités offertes par sa solution, une intelligence artificielle capable de comprendre les erreurs de conception dans les logiciels. "J’avais déjà travaillé sur le Québec à plusieurs reprises et je connaissais un peu leur mentalité dans le business. Pour démarrer à l’export, un pays de langue française, c’est tout de même plus simple, notamment par rapport aux compétences de notre effectif", détaille le dirigeant d’UX-Key.
Au-delà de la langue, les premières approches du marché et de ses acteurs confirment que la solution d’UX-Keys pourra être opérationnelle sans modifier profondément le code de l’application. "Le Québec avait un autre intérêt, en termes de comportement utilisateur. C’est finalement assez proche des données que nous avons aujourd’hui. Nous sommes tout de même en Occident, c’est moins exotique que des pays d’Asie ou d’Afrique, pour lesquels il faudra repasser par un entraînement de l’intelligence artificielle", détaille Loïc Cueroni.
Des mises en relation facilitées par la CCI franco-canadienne
Tous les voyants sont donc au vert, le dirigeant lance le développement de l’activité commerciale. "Nous avons été assez autonomes dans nos démarches, mais sur la période de prospection, nous avons travaillé avec différentes structures franco-canadiennes, dont la région Grand Est, qui essaie de construire un bureau de collaboration entre le Québec et la France", précise le dirigeant d’UX-Key. Les services de la CCI franco-canadienne, installée à Montréal, ont notamment facilité la mise en relation avec les prospects. "L’écosystème est assez dynamique, tout a bien fonctionné. Ce n’est pas cela qui va vous faire signer, mais cela permet d’avoir des rendez-vous plus vite", pointe Loïc Cueroni.
4 à 5 rendez-vous par jour lors des déplacements sur place
Pendant cette période, le dirigeant d’UX-Key soigne tout particulièrement ses déplacements. "Le voyage se prépare en amont, pendant presque 4 mois, et après, sur place, je pouvais enchaîner 4 à 5 rendez-vous par jour pour rentabiliser le voyage, ce qui s’est révélé assez fatigant". Au final, Loïc Cueroni estime avoir investi jusqu’ici 100 000 dollars pour déployer un courant d’affaires au Canada. "Pour une structure comme la nôtre, il est impossible de se planter sur un investissement à 100 000 dollars. Au-delà du montant, il y a surtout 18 mois d’investissement en temps et en homme. Si au final, nous aboutissons à la conclusion qu’il n’est pas possible de créer une structure, on peut mettre en danger l’entreprise", note le dirigeant d’UX-Key.
Une structure pour signer les premiers contrats
Créée officiellement le 12 juin, la nouvelle filiale d’UK-Key, baptisé EX-Clé, va permettre d’engranger du chiffre d’affaires sans arrière-pensée. "En 2023, nous avons créé la structure UX-Key International, à Metz, pour pouvoir signer les premiers contrats à l’international. Ensuite, pour créer une structure de droit canadien, il a fallu valider un certain nombre d’aspects juridiques et notamment transposer l’équivalent de la RGPD dans le droit canadien", précise Loïc Cueroni.
Conseillé par ses avocats, le dirigeant d’UX-Key saisit qu’il ne sera pas possible de signer des contrats au Canada et de rentrer en France pendant très longtemps : "Tant qu’on ne fait pas trop de chiffre d’affaires, ça reste possible, mais à 500 000 $, cela devenait compliqué", pointe Loïc Cueroni. "Arrive un moment où l’activité devient ce qu’on appelle un établissement permanent. À partir de là, vous pouvez être fiscalisé sur place. Et donc cela nécessite de créer une structure." Une création qui permet aussi de régler les problématiques liées à la TVA ou aux transferts de fonds.
Vers une nouvelle implantation en Allemagne
Une fois la stratégie arrêtée, s’est posée la question de la localisation de la nouvelle filiale : Loïc Cueroni a d’abord hésité entre les deux métropoles canadiennes, Montréal ou Québec. "Finalement, nous avons trouvé notre premier salarié à Sherbrooke, une ville plus petite entre Québec et Montréal", précise le dirigeant d’UX-Key.
Sur un marché de l’emploi extrêmement tendu, Loïc Cueroni a fait le choix de recruter un Québécois, plutôt que de faire appel à un expatrié. "L’aspect culturel, la sensibilité, tout cela faisait que je trouvais plus pertinent de travailler avec un salarié québécois".
Refusant de se fixer des objectifs, notamment en termes de chiffre d’affaires, Loïc Cueroni travaille désormais sur une nouvelle implantation à l’international, en Allemagne. "Une des raisons pour lesquelles nous nous exportons, c’est que nous anticipons une saturation du marché français", pointe Loïc Cueroni. La solution d’UX-Keys s’adresse en effet aux milliers d’éditeurs de logiciels présents sur le marché français. "Le marché est en croissance, mais à horizon un an et demi, voire 2 ans, nous aurons fait le tour, estime le dirigeant d’UX-Keys. Nous serons donc obligés d’élargir notre champ de prospection au-delà de la France."
