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Maison Revol se renouvelle en misant sur le design
Drôme # Biens de consommation # PME

Maison Revol se renouvelle en misant sur le design

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C’est dans le sol de son terroir, riche en kaolin, que la manufacture drômoise de porcelaine a puisé sa raison d’être en 1768. De Pierre Revol, qui bâtit l’entreprise, à son descendant Olivier Passot qui la dirige depuis 17 ans, la PME a su renouveler son savoir-faire grâce à des choix audacieux de design. Sans renier ses racines et ses valeurs, sous la bannière du fabriqué en France.

Olivier Revol, P.-D.G. de Maison Revol — Photo : jeannette aurelie photographe - contact@aureliejeannette.com - jeannette aurelie photographe

Elles sont rondes et hautes en couleur. L’audace d’un design tout simple, mi-contemporain, mi-intemporel. "Caractère", c’est le nom d’un service de table devenu iconique, et aussi le symbole d’un renouveau. Le point d’orgue d’une stratégie commencée au tournant des années 2000 alors que le secteur des arts de la table est secoué par la levée des quotas sur les importations chinoises.

"Comme de nombreuses entreprises françaises, nous fabriquions des produits de commodité en porcelaine blanche pour le marché du retail. Nous avons été submergés par cette concurrence à bas prix des importations chinoises de céramique et porcelaine", raconte Olivier Passot, PDG de l’entreprise depuis 17 ans et représentant de la 9e génération. Pour survivre, la manufacture Revol doit alors "se réinventer en travaillant sur sa singularité". Comme si le fait d’avoir traversé les siècles ne suffisait plus à assurer sa résilience.

Saint-Uze, site historique

Retour en arrière. En 1768, installés dans le petit village de Ponsas, Pierre Revol et son épouse Madeleine, travaillent la terre à leur domicile et, comme d’autres artisans potiers locaux, cuisent leurs objets en grès dans le four communal. Ce n’est qu’à la seconde génération, avec Joseph et Marie Revol que l’entreprise déploie ses ailes en déménageant sur son site de Saint-Uze en 1835, où elle est toujours implantée. Un site magnifique doté du potentiel foncier pour accompagner l’industrialisation de l’entreprise. Dans les années 1900, Louis Gustave Revol, représentant de la 5e génération, investit dans des ateliers de coulage dont les moules en plâtre permettent de gagner en productivité et de développer la production d’objets en porcelaine plus variés. En 1936, l’entreprise investit un nouveau marché, celui du sur-mesure pour Ricard, dont Revol façonne toujours les brocs. Des premiers pas qui allaient s’avérer visionnaires.

La suite ne sera pas toujours un long fleuve tranquille. Forte consommatrice de gaz pour cuire ses créations, Maison Revol est à chaque fois secouée par les crises énergétiques de la fin du XXe siècle.

Miser sur le design

Qu’importent les péripéties. Dans le même temps, Maison Revol (240 salariés ; 27 M€ de CA en 2023) s’attelle à ciseler sa singularité "en apportant plus de technicité, de design, de qualité à ses objets", déclare le représentant de la 9e génération de la dynastie Revol. Ce changement de cap opéré au tournant des années 2000 la conduit à recourir aux services de designers connus comme Inga Sempé, qui a travaillé pour Roset, Alessi et Baccarat et Noe Duchauffour-Lawrance, créateur de la collection best-seller Caractère.

"Nous avons pris des risques pour sortir du lot notamment en investissant dans la recherche et l’innovation", confie Olivier Passot. À ce jour, le budget R & D représente 5 % de son chiffre d’affaires, un pourcentage comparable à celui affiché par les medtech de Lyon-Gerland. En 2014, elle crée son propre studio de création pour collaborer avec des designers.

Ce changement de cap opéré au tournant des années 2000 conduit l’entreprise à recourir aux services de designers connus comme Inga Sempé, fille du célèbre dessinateur, qui a travaillé pour Roset, Alessi et Baccarat et Noé Duchauffour-Lawrance, créateur de la collection best-seller Caractère. Des collections plus épurées ou irrégulières dans leur finition qui font le bonheur des magazines de décoration et… des "steak houses" américaines qui raffolent de sa collection Basalt. Ou plus récemment encore la collection d’inspiration art primitif Yli du sculpteur Ferréol Babin, "qui invite à repenser la façon dont on présente les aliments".

Trôner sur les tables des chefs

Ce travail sur le design permet à l’entreprise de se détacher de son marché historique, celui du particulier pour investir celui de l’hôtellerie et de la restauration. "Nous avons encore accéléré dans les années 2010 en nous repositionnant sur le haut de gamme à destination du marché de l’hôtellerie-restauration et la fabrication de produits personnalisés pour des grandes marques de luxe", ajoute Olivier Passot. À ce jour, le marché du retail ne représente plus que 10 % du chiffre d’affaires - contre 50 % dans les années 2000 -, à côté de l’hôtellerie-restauration (plus de 60 %) et les produits sur-mesure (environ 30 %).

Dans le même temps, les ventes à l’international se sont envolées pour représenter aujourd’hui plus de 75 % du total. "C’est un marché sur-mesure pour lequel nous avons développé environ 1 500 références", précise celui qui a démarré dans l’entreprise alors dirigée par son père, en tant que commercial export.

Pour ces marchés professionnels, le design et la technicité sont des atouts clés, différenciants. L’entreprise dépose des brevets pour la cocotte Révolution, une cocotte en céramique dessinée par Inga Sempé, qui peut trôner sur les buffets à induction des grands hôtels.

Recycler et créer à nouveau

La PME drômoise innove encore en associant RSE et création grâce à la terre recyclée Recyclay, qui donnera naissance à la collection céramique NO.W à la finition joliment irrégulière. "Nous sommes les premiers porcelainiers et céramistes à avoir lancé une collection en pâte recyclée", déclare-t-il fièrement. Revol a mis au point un procédé pour recycler les boues issues des eaux de nettoyage de ses équipements, des résidus dont l’évacuation nécessitait jadis 14 camions et un retraitement payant en cimenterie. Aujourd’hui, cette matière première évite de l’extraction de terre et de nouvelles livraisons par camion. L’entreprise veut aller encore plus loin pour économiser l’eau.

"Nous consommons 12 000 m3 d’eau par an et l’objectif est d’en réutiliser les trois grâce à des circuits fermés ", explique-t-il. Montant de l’investissement : 100 000 euros. Elle valorise aussi la chaleur de ses fours pour sécher ses objets et chauffer l’atelier. Après avoir soigné ses fondamentaux, l’eau, la terre et le feu, Revol peut continuer de créer.

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