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En revoyant leur organisation, les restaurants Signorizza ont réduit le turn-over
Angers # Restauration # Ressources humaines

En revoyant leur organisation, les restaurants Signorizza ont réduit le turn-over

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Pour enrayer la fuite des compétences dans le secteur de la restauration, particulièrement marquée avec la crise du Covid, le groupe angevin Signorizza a entamé une vaste réflexion sur le recrutement et la fidélisation des collaborateurs. Cela s’est traduit par la mise en place d’une nouvelle organisation.

Sandrine et Erwan Rouxel sont à la tête du réseau de restaurants Signorizza, qui compte 35 établissements, 8 en filiale et 27 en franchise — Photo : Signorizza

Fidéliser les collaborateurs dans le monde de la restauration est difficile : c’est le constat dressé par Sandrine Rouxel-Landrin, qui dirige avec son mari Erwan Rouxel la chaîne de restaurants Signorizza, dont le siège social est à Angers : 35 établissements, 8 filiales et 27 en franchise, répartis dans toute la France. Le groupe (30 M€ de CA en 2023, 120 collaborateurs au siège et dans les filiales et 13 à 14 ETP dans chaque restaurant franchisé, soit plus de 450 personnes au total) a lancé un projet pour tenter d’apporter des solutions aux nouvelles problématiques en ressources humaines auquel le secteur est confronté. "Cela répond à une demande des collaborateurs qui veulent que l’on prenne en compte leurs besoins et leurs appétences, explique Sandrine Rouxel-Landrin, à une demande des dirigeants qui ont des difficultés pour recruter sur leur territoire, et plus largement à une question sociétale qui est la manière dont on vit avec le travail. Il faut tenir compte de tout cela si l’on veut traiter ce sujet."

Fermeture le dimanche

Avec la crise du Covid et la fermeture des restaurants pendant plusieurs mois, Signorizza, comme tout le secteur de la restauration, a vu nombre de collaborateurs décider de changer de voie professionnelle : "Lorsque l’on a rouvert nos établissements, témoigne Sandrine Rouxel-Landrin, également coprésidente de l’association Dirigeants responsables Anjou-Maine, on s’est retrouvés dans une situation extrêmement difficile et face à cela, plutôt qu’être dans la course permanente pour toujours recruter, très mal, très vite et n’importe comment, on s’est posé." L’enseigne a décidé alors de fermer ses établissements le dimanche pendant environ six mois, "pour ne pas épuiser nos équipes restantes" et de travailler sur le fond du sujet.

Retourner la table

Le groupe Signorizza s’est fait aider du cabinet angevin Perf’Hom, spécialisé en ressources humaines, pour faire naître un projet, Umanizza : "L’idée était de retourner la table sur la manière de recruter, de fidéliser et d’accompagner les collaborateurs dans le secteur de la restauration, poursuit Sandrine Rouxel-Landrin. En partant d’un constat simple : Depuis des années, en restauration, on dit : oui chef, bien chef ! Or, les jeunes collaborateurs ne s’en sortent pas avec ce fonctionnement."

Libérer le responsable de certaines tâches

Le groupe a commencé par réaliser une enquête pour établir une photographie de la situation, en interrogeant ses collaborateurs et ses franchisés sur ces sujets RH. "Ensuite, poursuit Sandrine Rouxel-Landrin, nous nous sommes dit que dans notre secteur, on est souvent face à un homme ou une femme-clé qui dirige le restaurant, qui sait faire, va tout faire et prendre toutes les responsabilités. Nous avons donc essayé de trouver dans nos équipes des gens qui, par appétence, pouvaient eux aussi se saisir d’une ou plusieurs responsabilités, pour l’accompagner."

Parmi ces compétences, celle de fermer une caisse le soir, de gérer le bar, de réceptionner les commandes ou encore d’intégrer les nouveaux arrivants. Avec pour effet de libérer d’une part le responsable sur certaines tâches et, d’autre part, d’offrir la possibilité aux gens de monter en compétences. "Cela peut donc concerner tous les collaborateurs quand le système est mis en place", précise la dirigeante. À ce jour, la démarche ne s’accompagne pas encore de revalorisation salariale mais l’application de ces compétences est intégrée dans le temps de travail.

Diminution du turn-over

Cette nouvelle organisation a fortement réduit le nombre de turn-over chez Signorizza. "À la sortie du Covid, nous étions à près 200 soldes de tous comptes, témoigne Sandrine Rouxel-Landrin, ce qui était ingérable. Aujourd’hui, nous sommes sur des taux tout à fait raisonnables, avec des restaurants qui n’ont pas de difficulté à conserver leurs collaborateurs ni à renforcer leurs équipes pour la saison estivale."

Le groupe encourage maintenant ses franchisés à se lancer dans cette démarche et des outils ont été créés pour les accompagner : "Ils commencent à s’y intéresser et ils sentent que l’on tient quelque chose qui peut les aider. Un certain nombre d’entre eux, même s’ils n’utilisent pas tous ces outils, ont mis des choses en place."

Qualifier les compétences

L’enseigne veut maintenant aller plus loin dans son projet Umanizza, la prochaine étape étant de qualifier des compétences, à travers un système d’open badges. Plus détaillés qu’un CV, ces outils numériques attestent de savoir-faire informels, et l’utilisateur peut les faire valoir, par exemple dans une recherche d’emploi ou lors d’un entretien d’embauche. "Ce sont des compétences très simples, explique la dirigeante, qui seraient ainsi reconnues. C’est une forme de validation des acquis dans un métier où on ne le faisait pas jusqu’ici." Signorizza souhaiterait mettre en place ce système courant 2025 et imagine déjà une troisième étape : que cette qualification des compétences s’étende dans d’autres enseignes de la restauration : "On a tous à y gagner, assure Sandrine Rouxel-Landrin. Un collaborateur qui déménage ou veut changer d’enseigne va pouvoir faire valoir une ou plusieurs compétences spécifiques avec ce système de certification. C’est aussi l’occasion d’aller vers une juste reconnaissance pour des gens qui pratiquent un métier difficile."

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